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Par Toshigome le 14 Mars 2014 à 22:43
L'un de mes professeurs particuliers quitta la pièce, furieux comme à son habitude, me laissant seule dans cet immense manoir qui, hélas, n'était autre que ma demeure. Je regardai par la fenêtre. Le soleil avait disparu, laissant place à un épais brouillard. Le ciel était avec moi, c'était le temps idéal.
Cela faisait huit mois qu'avec des connaissances nous avions pris une grande décision, le genre de décision qui vous suit toute votre vie. Nous allions tout quitter pour recommencer une nouvelle vie, une vie avec un vrai but cette fois-ci... Mais en réalité, cela faisait bien plus longtemps que l'idée de quitter cet endroit me tourmentait. Je ne me suis jamais senti à ma place ici. Un énorme lieu sans sentiment, où seul l'honneur d'une entreprise familiale compte. Pour tout dire j'étais la honte de la famille. Mes frères participaient déjà activement dans la vie de l'entreprise, lui donnant une belle image. Mes soeurs quant à elles, la représentaient avec grâce, mettant en avant leur beauté. Cela avait d'ailleurs réjouis mes parents, un important chef d'entreprise était tombé sous le charme de la plus âgée d'entre elles, le mariage ne se fit pas attendre, dès lors son "bijou" fusionna avec la notre. Quelle fille honorable ! La plus jeune, quant à elle, est mignonne à croquer, elle attire bien des partenaires, mais pour la lier au meilleur parti, il faut attendre qu'elle ait quelques années supplémentaires, 10 ans c'est trop jeune de nos jours... Tout de même, quelle fille adorable ! Mais moi, du haut de mes 17 ans, je ne comptais pas entrer dans le jeu de tous ces marionnettistes. Disons que j'avais toujours fait en sorte de paraître repoussante. Dans ce milieu où les femmes aux longs cheveux attiraient les plus riches, je coupais les miens moi-même tous les jours et ne les coiffais jamais. De plus je ne me séparais jamais de mes grosses lunettes opaques qui cachaient complètement mes yeux rouges... Aux grandes soirées dans lesquelles chacun s'habillait de sa plus luxueuse tenue, où les femmes voulaient resplendir dans leur grande robe, je restais en pantalon et pull que je prenais le plus grand soin de déchiqueter et salir. A force, ma famille, ne trouvant aucun moyen de faire de moi leur pantin, avait fini par me retirer de la vie politique de l'entreprise. J'étais enfermée, méprisée, étant celle qui apportait la honte, le déshonneur.
Gabriel m'avait donc donné l'occasion rêvée de partir de cette endroit. Le plan était simple, je disparaissais définitivement à 19 heure tapante. Autrement dit, dans un quart d'heure. Tant d'années à supporter une telle vie pour la quitter si facilement, s'en était presque désespérant. Je sortis de la salle et rejoignis ma chambre deux étages au dessus. Je pris ma saccoche qui était au fond de mon armoire. Elle contenait mon ordinateur portable, évidemment, personne n'était au courant que je l'avais. Je me chaussai d'une simple paire de basket et j'enfilai une veste noire, inconnues toutes deux de mes goeliers. Je mis un peu d'argent dans ma poche, j'avais pris soin de le conserver secrètement depuis huit mois. J'étais enfin prête.
Descendant les escaliers deux par deux, je fis en sorte de ne croiser aucune servante. Je quittai le manoir par la porte de derrière, celle du personnel. Là, je dus m'allonger derrière un buisson, pour éviter le jardinier qui contemplai son travail. Je rampai sur quelques mètres puis courus sans crainte d'être vu, protégée par l'épais brouillard. Il était 19h00, plus jamais on ne me verrait dans cette région. Après quelques minutes de courses rapides, je m'arrêtai. Reprenant mon souffle, je fis un trou dans la terre et y mis ma grosse paire de lunettes. J'enterrai tout mon passé par la même occasion. Quelle ironie, cette fuite était si simple. Contrairement aux deux autres, je n'avais pas besoin de simuler ma mort, je n'existais pas à leurs yeux... Je ne pus m'empêcher de rire; un rire qui traduisait tout ce que je ressentais.
Deux jours plus tard, j'étais à la gare, à l'heure convenue. Tout allait commencer.
Nouvellement Jade M.
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Texte écrit par Toshigome
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